J'essaie de bosser sur ma traduction aéronautique, c'est vrai, promis, j'essaie.
Mais c'est pas de ma faute (la mauvaise foi court dans mes gènes, là encore, je n'y peux rien), à chaque fois que je lis le mot "roquette", je me demande ce que de la salade vient foutre au milieu des essais vrille et de l'avionique (oui, c'est un vrai mot, apparemment).

Du coup, autant poster ça.

J'aime profondément l'ironie. C'est pour ça que j'adore passionnément (j'aime follement les adverbes aussi) quand quelqu'un me raconte les confidences de quelqu'un d'autre et me déclare les yeux dans les yeux, de l'air le plus sérieux du monde : "mais, eh, tu dis rien, hein".

Promis, je serai aussi muette que toi.


(Et c'est là que je suis lancée dans une spirale infernale de "oh mon dieu, est-ce que je le fais aussi ? Autant dire que ma traduction aéronautique ne va pas beaucoup avancer ce soir.)

Je peux pas fêter Noël à St Senoux.

Y'a pas mes amies pour aller traîner au marché de Noël ou aux Beaux Arts pour profiter des vacances, pour boire des diabolos au Café latin et des chocolats chauds au Art's.
De toute façon, y'a même pas de marché de Noël.

Y'a pas d'endroit où installer la crêche, pas de buffet commodément installé sous un cadre derrière lequel on peut bloquer le papier roche.
 
Y'a pas les 2 fenêtres du salon où accrocher les guirlandes électriques.

Y'a pas le coin devant les bibliothèques où mettre le sapin.

Y'a pas la télé pour regarder les films de Noël.

Y'a pas le marché tout près pour que mon père ailler acheter le sapin.

Et même si je fais des truffes et des fruits déguisés, même si je décore le salon et le sapin avec ma mère en écoutant du Manu Chao, même si je mets des chevaux Belleville et un lapin Playmobil dans la crêche, même si on est tous les 4 pour le réveillon et qu'on met nos chaussures sous le sapin, je peux pas fêter Noël à St Senoux.

C'est pas chez moi.

C'est pas de ma faute. J'essaie vraiment de me concentrer.

Mais quand je vois par la fenêtre de SPIRAL la pluie de décembre tomber sur le toit du bâtiment du Pangloss, des arbres nus et un ciel si bas qu'un canal s'est pendu alors que je tente vainement de faire entrer un peu de néerlandais dans ma caboche, j'y peux rien, je pense à des chansons de Brel.

Surtout depuis que j'ai appris le mot "wanneer" et que j'ai subséquemment compris la première moitié du 1er vers de Mijn vlakke land (ouais plus que 27 et demi !)(oui, j'ai compté parce que j'ai que ça à faire un vendredi soir)(en plus, c'est même pas vrai, j'ai juste un peu de temps avant d'aller rencontrer un surtitreur du TNS dans les coulisses et de pouvoir trop me la jouer)(et on ne se moque pas de mon niveau, j'ai commencé le néerlandais hier)

"Wanneer de Nordsee..."

C'est pas de ma faute si, à part les pigeons fous de derrière mon immeuble, il y a peu de choses que j'aime autant que voir la pluie tomber.

Il y a une chose que je déteste à propos d'Internet.

Outre le fait que ça projette instantanément tous les connards du monde sur ton écran, je suis plutôt a priori une fan. (Réfléchis 2 secondes : des lolcatz ! Des quotes ! Des séries ! Tous tes amis accessibles ! Les fringues les plus géniales du monde à portée de clic ! Des blogs, des fanfictions à lire ! Toute la terminologie dont tu as besoin pour tes traductions !)

Mais il y a une chose qui me dérange. En un clic, juste une petite pression de l'index sur le bouton de la souris, tu peux jouer ton avenir. Cliquer sur "Envoyer" peut décider de ta vie entière. Les lettres, au moins, ça avait de la gueule. Tu sentais l'importance de ce que tu t'apprêtais à faire, c'était symbolique, c'était solennel. Tu écrivais l'adresse à la main, tu glissais le papier dans l'enveloppe, tu collais un timbre, tu regardais l'adresse une dernière fois avant de la déposer dans une boîte aux lettres. Et maintenant ? Tu insères ton CV en pièces jointes, tu fais un copier-coller de l'adresse mail du destinataire et tu cliques sur "Envoyer".
Mon avenir dépend d'un clic.

Je ne suis pas sûre d'aimer l'idée qu'on vit dans un monde où c'est comme ça que se jouent des vies.

Par contre, bizarrement, ça me dérange 'achement moins de vivre dans un monde où, d'un clic, on peut trouver ça :

Lundi, à cause d'une manoeuvre dont l'idée n'aurait même pas dû m'effleurer à la base tellement elle est ridicule, j'ai cassé la plaque de verre de mon bureau. Sur le bureau se trouvait un verre rempli d'eau, donc j'en ai profité pour réduire encore mon stock de verres et faire tomber de l'eau dangereusement près de la multiprise et des câbles qui se trouvent sous ledit bureau (je déteste faire les choses à moitié).
J'ai ramassé les morceaux, j'ai réussi à ne me faire que 2 coupures, j'ai tout nettoyé. Je me suis sentie très bête.

Mardi, parce que j'avais entreposé les morceaux de verre contre un mur près de l'entrée de ma cuisine, que c'était le matin et que je suis tout sauf matinale, je me suis cogné le pied contre les extrémités pointues de certains morceaux (qui bien sûr pointaient vers l'entrée de la cuisine, ai-je déjà mentionné que j'avais souvent des idées ridicules ?). Je me suis fait une belle coupure.
J'ai mis un pansement,  j'ai déplacé les morceaux de verre les plus pointus. Je me suis sentie extrêmement conne.
Et, alors que mon appart est rempli de morceaux de verre cassé, je me suis coupée avec une feuille. (Ca, c'est le détail qui me tue.)

Mercredi, j'ai buté contre les deux plus grands morceaux de verre que j'avais laissés près de la cuisine (idées ridicules, re-rebonjour), ils sont tombés et se sont cassés. Je me suis recoupé la main.
J'ai ramassé les morceaux, je les ai mis avec les autres, j'ai re-nettoyé. Je commence à douter de mon droit à porter le titre de créature douée d'intelligence.

J'en suis à 6 coupures. J'hésite à réserver tout de suite une chambre d'hôpital pour la fin de la semaine.

Je me demande si mes profs me laisseraient dormir jusqu'à lundi matin si je leur explique que c'est pour la sécurité de tous.

Sinon, j'ai hâte de voir le reste de la semaine.